mardi 31 juillet 2012

Jeux interdits aux amateurs ? (7)

L'autre olympisme de Maheu

René Maheu,
directeur de l'UNESCO,
dénonce une forme d'imposture,
le mensonge et le travestissement
de l'esprit des Jeux - faisant au passage
habilement parler les morts
puisqu'il se dit certain
que le baron Pierre de Coubertin,
homme à l'"étonnante liberté intellectuelle",
n'aurait pas hésité
à engager cette "révision courageuse"
des règles d'admission aux JO

La posture quasi chevaleresque du CIO annonce déjà le virage que va prendre le mouvement olympique au sortir des années 80 ; dernier raidissement avant un relâchement inéluctable. La chose olympique finira par échapper à ses maîtres sous les coups répétés de personnalités imperméables à un idéal vieillot et décalé. Le tournant sera marqué par l'assaut mené par un adversaire de taille : l'UNESCO.

Le Français René Maheu, son directeur général, jette un pavé dans la mare olympique en 1963 en défendant la "démocratisation du sport" : "le champion est nécessaire au sport (...). Si l'amateurisme est la vérité de la masse sportive, l'imposer à l'élite est sauf exceptions qui confirment la règle condamner cette élite au mensonge. Sur ce point, les conceptions éthiques de Pierre de Coubertin se réfèrent à un état de la société et à un stade technique du sport, dont il faut avoir l'honnêteté de reconnaître qu'ils sont dépassés (...). Aujourd'hui, le champion ne peut pratiquement sortir de la masse sportive que par un régime spécial qui en fait un athlète d'Etat, ou un athlète d'université, ou un athlète de société commerciale. Au sens strict du terme, ce n'est plus un amateur. Pourquoi tant hésiter à reconnaître que c'est un professionnel ? Est-ce que l'artiste le peintre, le musicien, l'écrivain est disqualifié pour toucher des honoraires ? Pourquoi l'argent (ou tels avantages matériels équivalents) souillerait-il les seuls champions sportifs, quand il ne souille pas les poètes eux-mêmes ? En réalité, ce qui souille, c'est le mensonge ; et il est grand temps, à mon sens, de dire les choses telles que tout le monde sait qu'elles sont, à savoir que les normes périmées de l'amateurisme ne font plus, au mieux, l'objet, de la part de la majorité des champions et apprentis champions, que d'une observance formaliste".

En dépit des réactions passionnées que la déclaration suscite, la thèse de l'amateurisme marron sonnera le glas de l'amateurisme "sourcilleux".

1 commentaire:

  1. Deux sortes d'hypocrisie sont dénoncées : 1/ celle qui consiste à refouler aux portes de l'olympisme toute idée de marché du sport alors que les esprits s'accommodent sans difficulté de l'existence d'un marché de l'art, de professionnels rémunérés pour la création de richesses qu'ils contribuent à produire ; les partisans de l'amateurisme olympique sont en effet attachés à une certaine définition du sport (cf. Avery Brundage), la seule acceptable à leurs yeux, mais cette définition est contingente et de nature à évoluer en fonction de la place que nos sociétés sont prêtes à lui octroyer. 2/ celle qui consiste à fermer obstinément les yeux sur la réalité, où l'économie, les contrats, les sponsors, l'argent ont pénétré depuis quelques temps, et dans de folles proportions, l'univers sportif.

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