mercredi 29 février 2012

Le modèle allemand

En cette période de crise économique, financière, politique, sociale, culturelle, sportive et de démence - allons, ne cédons pas à la facilité et gardons le moral -, on ne jure que par l'Allemagne sans rien en connaître vraiment. Mais le titre et l'objet de ce billet ne sont pas une provocation. Malheureusement. Car si je ne sais rien ni du salaire moyen allemand ni de la recette miracle qui fait que les machines à café, à tondre et à laver fabriquées outre-Rhin s'exportent avec succès, je connais en revanche la qualité de la Nazionalmannschaft ; il y va, en somme, de celle-ci comme des berlines allemandes.

La Mannschaft, valeur refuge

M. Ozil est talentueux, humble et gaucher.
En soi, dire du onze allemand qu'il est un produit hautement compétitif n'est pas un scoop. L'Allemagne est certainement l'équipe la plus fiable et la plus régulière en Europe, celle sur laquelle vous pouvez miser les yeux fermés toutes vos économies : elle ne vous fera pas faux-bond et sera dans le dernier carré de toutes les compétitions auxquelles elle participe. Comme dirait l'autre, "Football is a simple game: 22 men chase a ball for 90 minutes and, at the end, the Germans win". Un trader vous traduirait la même idée autrement en vous parlant de valeur refuge : peu de risque à parier sur elle.

Mais, fait nouveau, non contente d'être solide et efficace, l'équipe dirigée par Joachim Löw est maintenant agréable à regarder. Son football résolument offensif est fluide et une jeune génération de pépites est déjà prête à assurer la relève (Özil, Kötze, Sahin, Kehdira et le gaucher dont on parle moins ici, Reus) sans que le passage de témoin n'entraîne ipso facto une baisse de performance pour le football allemand. La qualité dans la continuité ; un modèle.

Et ein, et zwei et drei nullpunkt !

Au petit jeu des pronostics, je mise évidemment sur l'Allemagne (3-0) dont j'hésite à porter le maillot pendant l'Euro prochain. Ce qui me freinera peut-être au dernier moment sera une malheureuse coïncidence : on fêtera alors les 30 ans de la soirée la plus douloureuse pour le football français - de son numéro 3, surtout, sorti inconscient dix minutes seulement après être entré en jeu. Mais l'Allemagne que j'aime maintenant n'est plus celle de Schumacher.

lundi 6 février 2012

Gentleman cabriolet

A l'instar d'un Raymond Domenech qui me manquerait un peu, Djibril Cissé a été - et reste - un bon client pour OS. Toutefois, si celui que l'on suit désormais sous la tunique rayée des Queens Park Rangers ("Quiou Pi Oare" pour briller dans la City) a essuyé des salves d'ironie au hasard de mon humeur d'ursidé, il n'a jamais été attaqué en tant qu'homme ; tout comme l'ancien sélectionneur. Oh, j'ai pu railler son style d'ado-millionnaire, calqué sur celui des producteurs de R'n'B, mais rien de très méchant. La plupart du temps, c'est sa technique frustre que je pointe du doigt. En clair, je lui reconnais des qualités de buteur très au-dessus de la moyenne, mais son profil ne me convient pas : je ne saurais pas comment le faire jouer sur un terrain.

Au vrai, le personnage Cissé provoque même sympathie et respect. Attachant, incontestablement. Un mec qui ne calcule pas, qui aime ses maillots autant que les bolides qu'il collectionne. Un destin hors normes et un moral en acier. Le Djib' est en effet revenu de très loin. Deux blessures graves qui forcent la plupart des mortels à dire adieu, à contrecoeur, aux pelouses de haut niveau. Le genre de blessures qui vous retournent l'estomac et vous filent soudain l'envie de vider vos tripes lorsque vous la voyez à l'écran.

Samedi, Cissé a été exclu à la 34e minute lors du match de son équipe, livré à domicile face à Wolverhampton, pour avoir chahuté physiquement l'auteur d'un tacle par derrière qui n'a, quant à lui, reçu qu'un carton jaune - sanction de droit commun en Premier League tant que la cheville demeure visiblement attachée au reste du corps.

Un fait de jeu, me direz-vous. L'expulsion est peut-être sévère, mais c'est ce qui arrive lorsque, saisi d'un irrésistible sentiment de violence, on saisit la gorge d'un adversaire pour se faire justice - une mauvaise justice - ou pour régler un compte. Essayons d'éduquer les sanguins, sinon de chasser ces images des yeux de nos enfants...

Certes. Mais, pour une fois, j'ai envie de m'asseoir sur la bonne morale car la réaction du joueur m'a touché, que je l'ai comprise et qu'elle m'a presque paru légitime. Le puni du soir a en effet twitté ça (pour les non-familiers, les messages se lisent de bas en haut...) :


Djibril explique sur son compte la raison de son comportement "stupide" - la peur de se blesser gravement une nouvelle fois - et demande pardon aux amoureux du club qui lutte, notamment avec Wolverhampton, pour rester parmi l'élite en Angleterre. A-t-il été conseillé ou contraint de communiquer ? On ne me surprendrait pas si l'on apprenait que le geste est spontané. Il me renverrait l'image que j'ai du joueur à l'excentricité aussi ostensible : un individu aux valeurs qui ne me laissent pas insensibles, au contraire de celles d'un autre attaquant (admiré ici pour ses prestations sportives) qui s'est aussi distingué ce week-end par un twitt qui alimentera les clichés sur ces professionnels aux cuisses mieux remplies que les têtes.


mercredi 1 février 2012

Blake Griffin, Perkins out

Blake A. Griffin. 23 ans. 2m08, 115 kg
Blake A. Griffin. Ce nom ne vous dit sûrement rien, excepté aux fans de la NBA ou aux pères insomniaques. Celui de Kobe Bryant, Tony Parker, Joachim Noah ou LeBron James sonne peut-être davantage à l'oreille. Ce serait normal, après tout, puisque l'on a beaucoup dit du dernier, notamment, qu'il était le nouveau Jordan. Comme la légende des Chicago Bulls auquel il a d'ailleurs emprunté le numéro 23, "King James" - dîtes aussi "The Chosen One" (L'élu, tout un programme) - est en effet hors norme. Mais si je devais lui chercher des poux (de loin), je dirais qu'il lui manque encore des titres. Car seules les bagues font les grands champions et, à ce jeu-là, King James a pris du retard.

Notre "méconnu" Blake Griffin a pourtant plusieurs choses en commun avec LeBron James. D'abord, le gamin d'Oklahoma City a intégré la ligue de basket en 2009, en sortant numéro 1 de la draft, système de recrutement qui ressemble un peu à des enchères publiques. Ce classement est rarement anecdotique. Shaquille O'Neal en 1992, James en 2003, Dwight Howard en 2004 ou Derrick Rose en 2008 ont également été des premiers choix. Être major de draft en dit long, souvent, sur le talent du joueur et les espoirs qu'il suscite et, à cet égard, Griffin n'usurpe pas son premier titre honorifique : son nom est bien à inscrire en lettres d'or sur la liste des tops et non sur celle des flops (Oden ou Bargnani, par exemple) ou sur celle des oublis (quand on songe que Kobe n'a été choisi qu'en 13e position !). Précisons toutefois, pour être complet, que son passage par la draft avait provoqué une excitation ponctuée d'un drôle de doute en raison d'un shoot jugé peu académique que ne faisaient pas totalement oublier d'impressionnantes qualités athlétiques.

32, v'là Griffin !

Ensuite, il est abonné aux highlights, collection des plus belles actions de la NBA qui fait le tour de la planète via les sites de partage de vidéos et que vous pouvez déguster sur le site officiel de la ligue nord-américaine. Chaque sortie des Clippers - l'autre club de Los Angeles, où B. Griffin sévit - est une promesse de spectacle à vous clouer le bec et d'enrichissement de la vidéothèque.

Il y a deux jours, le numéro 32 de la franchise californienne a tout bonnement écrasé le panier de basket... et l'adversaire qui se tenait pourtant à une distance raisonnable du cercle. Sans doute le malheureux Perkins pensait-il (comme nous tous) se prémunir ainsi contre l'assaut de la machine Griffin. Erreur.

Je vous laisse juger de la performance - à ranger dans la boîte à trésors à côté de l'incroyable envolée de Vince Carter aux JO de Sydney...


Il y a trois catégories de personnes en ce monde : les humains qui sautent et les humains qui ne savent pas sauter. Blake Griffin est la 3e catégorie.