vendredi 30 mars 2012

Le prix d'un mot

A quelques jours d'intervalle, Bernard Laporte et Jean-Michel Aulas ont été respectivement sanctionnés par les commissions de discipline de la Ligue nationale de rugby et de la Ligue de football professionnel. On sait que les deux personnages, par ailleurs fortes têtes médiatiques, sont ce que l'on appelle des grandes gueules qui ont en commun de réagir, de manière souvent trop épidermique, contre tout ce qui ressemble de près ou de loin à une agression ou à une injustice dont serait victime le club de leur coeur ; un paternalisme parfois sincère, même s'il n'exclut pas l'excès ou la mauvaise foi, qui est toutefois de nature à leur attirer les ennuis. C'est qu'on ne s'impose pas comme cela aux autres en justicier car, ici comme ailleurs - c'est heureux -, la justice privée n'a pas droit de cité.

L'entraîneur et directeur sportif du RC Toulon a écopé d'une interdiction de terrain et de vestiaires d'une durée de 60 jours. De son côté, le patron de l'Olympique lyonnais est tenu éloigné de ces mêmes lieux pendant 1 mois ferme.

D'un côté, les insultes, de l'autre, les injures

La sanction n'est pas sortie du képi des gendarmes et l'un, en manque d'inspiration, n'a pas simplement copié l'autre, plus imaginatif. Dans un système pénal ou disciplinaire, un texte définit au préalable une infraction assortie d'une sanction, et le rugby comme le football ne font pas exception. En l'occurrence, il s'agit des articles 723 et 724 des Statuts et règlements généraux 2011-2012 et des articles 2.1 et suivants du Règlement disciplinaire annexé aux règlements généraux de la Fédération française de football. Pas de surprise donc pour celui qui, par goût ou par imprudence, infligerait une "morsure" à l'adversaire : il n'y a qu'à savoir lire pour découvrir les conséquences de son geste.

Dans l'un et l'autre cas, la sanction prononcée est de même nature. Un esprit simple conclurait que les faits sont sûrement identiques, du mois comparables, et que la sortie verbale de JMA est simplement un peu moins rugueuse que la saillie de Bernard Laporte. En vérité, il a été reproché aux deux personnages d'avoir critiqué vertement les coups de sifflet de l'arbitre lors d'une rencontre de championnat disputée par leurs poulains. Les qualifications exactes qui ont été retenues sont "Action contre un officiel" (art. 723.1.1) pour l'ex-ministre des sports et "Propos blessants et injurieux à l'encontre d'un officiel" (art. 2.4 I et 2.5 I) pour le Lyonnais. On rappellera les faits pour plus de clarté, en espérant que reproduire les déclarations ne fasse pas ipso jure de nous des complices ou des coauteurs...

L'accusé Laporte a insulté l'arbitre de "con", ajoutant qu'il était "bidon" et qu'il comprenait "qu'avec des mecs comme (lui), on n'ait pas des désignations internationales" (NDLR : il n'y a plus d'arbitres français désignés par la fédération internationale pour diriger les rencontres entre nations de l'ovalie, et le coach toulonnais sous-entend que cette absence s'explique ni plus ni moins par leur profonde nullité).

Jean-Michel Aulas, quant à lui, a mis en doute l'impartialité de l'officiel, lui reprochant son "laxisme orienté", à l'issue d'un match à suspense qui n'aura ravi que les téléspectateurs (Lyon-PSG, 4-4 dont le dernier but égalisateur, marqué par Paris à la 94e minute, est resté en travers de la gorge du président). Sifflant, selon lui, à sens unique, il l'a soupçonné d'être trop aveuglé par "ce qui brille" et, partant, d'"incompétence".

Ni chaud ni froid

En principe, à ce stade, il suffit de regarder ce qu'il est inscrit dans la case en face de l'infraction pour deviner le contenu de la future sentence. Ainsi, la charte du rugby prévoit, en sus d'éventuelles amendes pour l'épris de justice et le club, 40 jours à 1 an de suspension en cas d'insulte à arbitre là où son équivalent pour le ballon rond prévoit entre 4 et 12 matchs de suspension. Si cette fourchette laisse place à l'appréciation des "juges", le contenu de la décision dépend en grande partie de la qualification effectivement retenue : le plafond de 4 matchs est ce qui sanctionne des propos blessants (entre 15 jours et 1 mois), celui de 12, des propos injurieux (entre 45 et 60 jours).

Voilà qui est étrange car, si le cas "Bernard Laporte" se situe bien dans la tranche prévue par les règlements, il est difficile de savoir si la sanction prononcée contre JMA est justifiée dans son quantum puisque l'unité de mesure prévue par le texte (le match) ne correspond pas à celle de la décision de la commission (le mois). Par ailleurs, la sanction est expressément prononcée en raison de propos "blessants et injurieux". Qu'est-ce à dire ? Faut-il cumuler les interdictions dans cette hypothèse ? On serait loin du compte ! Le moins que l'on puisse dire est que la commission de discipline de la LFP ne s'est pas vraiment embarrassée de cette question... En adepte de la légalité, tout cela me chagrine. On notera simplement que l'entraîneur de l'OL, également épinglé par la police, a lui écopé d'une sanction de 2 matchs avec sursis pour "propos blessants", ce qui correspond davantage au tarif prescrit.

Barème des sanctions applicables aux acteurs du rugby 2011-2012 (art. 725-1)

L'écart entre le contenu des deux sanctions nourrit chez moi un sentiment bizarre, ce genre de sentiment qui né d'un déséquilibre dont la cause vous échappe et qui vous plonge dans l'inconfort. Il n'y a pas ici deux poids, deux mesures, faute de pouvoir exactement comparer les comportements, et on ne peut pas dire qu'il y ait eu, de la part de la commission de discipline de la LFP, de la complaisance - 1 mois ferme, c'est assez rare. Mais je ne peux m'empêcher de douter de l'échelle des sanctions, et pas seulement quand je les compare à celles infligées dans le rugby qui ne sont pas forcément un étalon idéal - tout de même, pour des faits comparables de manque de respect à un officiel, les uns encourent une amende d'un montant de 17 à 34 € tandis que les autres risquent 500 à 8 000 € (le RC Toulon a ainsi été condamné à payer une amende de 4 000 €)...

A quoi bon ?

Une telle différence est choquante et ne contribue pas à jeter sur le football une lumière flatteuse, qui plus est dans un contexte général de grande hostilité vis-à-vis de ses "millionnaires". Il ne s'agit pas de se raccrocher à un prétendu devoir, dont seraient redevables les hommes qui portent les costumes les soirs de match, de donner l'exemple et d'éduquer ainsi les plus jeunes : un responsable peut avoir son coup de sang, vomir des mots dans un style fleuri ; cela doit être incriminé et puni, mais cela reste humain. Ce qui me heurte sera, en revanche, que la sanction ne soit pas à la hauteur. Or, de ce point de vue, je me demande, au-delà du cas "JMA", si le football ne se voile pas un peu la face avec ces amendes dérisoires et ces sanctions sportives - interdictions de couloirs - qui, pour être un peu moins molles qu'auparavant, restent toutefois inoffensives et parfaitement indolores. Elles semblent sans rapport avec l'atteinte portée au sport, et cette disproportion  risque de faire oublier moins la finalité de la sanction que la valeur que l'on veut protéger.

Ces deux cas sont, pour moi, une invitation à la réflexion comme au nettoyage de printemps. Outre le défaut de clarté de la décision prononcée contre le boss de l'OL, il me semble que les sanctions infligées dans le monde du football gagneraient à être repensées, dans un sens ou dans un autre. Les abandonner ou les durcir, pour ne pas rester plus longtemps dans des eaux tièdes et troubles.

jeudi 29 mars 2012

Nantes dans les starting blocks


Bien malin celui qui peut prédire avec exactitude si le FCNA rejoindra l'élite à l'issue de cette saison pleine de ratés et de rebondissements : un soir on y croit, un soir on déchante, et lorsqu'elle se trouve à la portée des Canaris, la troisième marche du podium prend un malsain plaisir à se défiler sous leurs crampons. Depuis le mois de septembre, pourtant, j'ai le sentiment que cette année est la bonne et mon opinion n'a pas évolué. C'est maintenant, toutefois, que tout va se décider et c'est maintenant que les hommes de Landry Chauvin doivent ne pas flancher.

Je prends le pouls de Nantes et je vois les supporters des Jaunes et verts abattus, convaincus que le tournant de la saison était ce match perdu à Lens, lundi, après une incroyable et chaplinesque boulette du jeune gardien de but Erwin Zelazny (la sortie peu inspirée du portier survient, sur la vidéo, à 1'14).



Le gaucher s'en mord certainement encore le bout des gants, lui qui estime que son jeu au pied est l'un de ses points forts. Le clin d'oeil est redoutable et piquant, mais c'est la vie... On se permet d'en rire car il y a un temps pour tout et, après celui du sourire, vient celui de l'espoir.

1 point ou 0, après tout, ça ne fait pas encore une grande différence. Cette saison, la Ligue 2 est un drôle de championnat, en effet, avec ni plus ni moins que sept prétendants à la dernière place qualificative pour l'élite, entre Troyes (3e) et Châteauroux (9e) à neuf journées de la fin. Pardon d'avance pour cette lapalissade, mais le FCNA a finalement uniquement besoin de remporter des confrontations directes face à ces adversaires-là ou d'une bonne série pour sortir de ce piège et renouer avec son passé et son public - Landry Chauvin ne dit pas le contraire.

Un money-time compliqué, un ticket à portée

De ce point de vue, les Canaris vont être servis : les deux prochains matchs à domicile seront disputés contre Troyes, justement, et Reims (2e). Avec, également, un déplacement à Laval, à Monaco et à Angers, la réception d'Amiens - gloup -, d'Arles-Avignon et de Sedan lors de la journée de clôture, on ne peut pas être résigné et dire ou même croire que tout est fini. 27 points restent à prendre, en ramasser 18 devrait suffire à faire les valises pour aller à l'étage supérieur ; c'est évidemment beaucoup (cela ne représente pas moins de 6 victoires sur les 9 derniers matchs - donc 3 jokers), mais ce n'est pas impossible, contrairement à ce que beaucoup, sur les bords de l'Erdre, pensent un peu prématurément.

C'est à double tranchant : les épreuves qui attendent les Jaunes et verts sont assurément difficiles. Mais on ne gagne jamais sa place parmi l'élite en affrontant des unijambistes, il faut donc accepter le défi sans le craindre. Ce qui est certain, c'est que c'est là, maintenant, qu'il faut être derrière son équipe.

mercredi 28 mars 2012

Les biches ne l'ont pas volley*

Il n'y a pas à tortiller du cul : la décision prise par le conseil d'administration de la Fédération internationale de volley-ball le 18 mars dernier, concernant le beach-volley féminin, mérite d'être applaudie. N'est-ce pas, au fond, un point gagné par les femmes, pour leur dignité, que de leur permettre désormais de se soustraire à la vue immédiate des yeux et des objectifs de pervers en mal d'excitation en validant le port de tenues de compétition autrement moins sexuelles qu'un bikini finissant inexorablement par rentrer dans les fesses ?


Ravalement de façade pour la FIVB 

La mesure, à effet immédiat, sera applicable aux prochains jeux olympiques de Londres. Cela dit, ce n'est, bien entendu, pas la perspective de jouer sous les chats et les chiens anglais 0_° ni la crainte de faire attraper aux compétitrices un vilain rhume qui ont animé les réformateurs, puisque l'on apprend, en fouillant un peu sous le sable, que la décision a été adoptée "to respect the custom and/or religious beliefs". On se demande toutefois si un tel respect affiché des croyances personnelles ou religieuses suffit dans la mesure où la nouvelle règle paraît à la merci de clauses contractuelles, imposées aux filles par des sponsors soucieux de l'image du beach-volley et qui ne renonceront pas facilement à couper l'élastique - 7 cm max, c'est tout de même très vendeur (pour rappel, la largeur réglementaire maximale des "culottes" ne devait pas dépasser les fameux 7 cm)...

Cliché soft d'une compétition féminine de beach-volley - Image d'archive ?
Une chose est d'autoriser des bermudas moins sexys, une autre est d'interdire le quasi-string. En laissant aux sportifs le choix de la tenue qui leur convient, la FIVB a opté pour la solution la plus ouverte... mais aussi la moins compromettante. Après tout, à défaut d'être absolument courageuse, on ne peut pas dire qu'il s'agisse d'une mauvaise politique ; il ne faudrait pas non plus que les terrains ensablés, déjà en manque de fréquentation, finissent par être désertés...

* Je m'octroie d'office la palme du titre le plus nul, assurément, pour un article de blog.

mardi 27 mars 2012

Le Messi angevin

Tout est parti de trois fois rien, d'un site Internet d'un club de Ligue 2 française ; autant dire, un lieu aussi désert qu'un parking de supérette un dimanche après-midi. Et pourtant, à défaut d'être the new place to be, il fallait y être pour y lire un communiqué du 23 mars qui a fait s'emballer la machine à parler.
"Suite à la détection organisée fin février sur ses installations sportives du Stade Paul Robin, à l'attention des joueurs nés en 1995 et 1996, la cellule recrutement d'Angers SCO et ses entraîneurs ont retenu douze noms de garçons susceptibles de venir renforcer leurs effectifs en vue de la saison prochaine. Il s'agit de : Bakna Omar, Diboune Benaïssa, Dubois Antoine, GBessi Yannick, Messi Lionel, Muanangani Nathan, Pineau Thomas..."
C'est écrit noir sur blanc : Lionel Messi a été "détecté" et devrait fouler les pelouses de cette ville de France où il fait bon vivre et boire. Oui, mais voilà, il faudra bien, néanmoins, descendre cul-sec quelques verres de muscadet avant de donner à vos mirettes l'impression de voir le triple Ballon d'or transpercer les défenses de la deuxième division française : il ne s'agit évidemment que d'un homonyme, un jeune milieu défensif camerounais d'1m85 - un géant comparé à la puce barcelonaise.

Zacharie Enguene
Quitte à recruter des joueurs à l'accent catalan et aux couleurs africaines, on regrettera que Jean-Marie Dongou ou Zacharie Enguene ne soient pas ceux que les cellules de recrutement françaises aient réussi à faire venir. Agés également de 16 ans, ces deux Camerounais-là pulvérisent tout sur leur passage et font déjà beaucoup parler d'eux à la Masia - le centre de formation de Barcelone.

samedi 24 mars 2012

Unreal Madrid

Cela se passe de commentaire... Ca tombe bien, car c'est le week-end, et le week-end, c'est repos, balade au bord de la mer et soleil...

vendredi 23 mars 2012

Joueurs de chant

Paris fait peau neuve. Si on ne sait pas encore tout à fait ce qu'il va advenir de l'ex-futur projet de démolition ou de métamorphose du Parc des princes, une mutation plus légère a déjà été opérée, qui devrait entraîner son flot habituel de moqueries, mais qui confirme que le club de la capitale entend changer de dimension : la semaine dernière, les joueurs du Paris Saint-Germain se sont en effet rendu dans un studio pour y enregistrer une nouvelle version de l'hymne officiel du club depuis 2010 - Go West (Pet Shop Boys).

Le résultat, le voici...


Je m'attends évidemment à une pluie de réflexions sarcastiques ou de blagues niveau CM2 ; il est difficile, à la vérité, de résister au sens du courant. Mais j'essaie : contrairement à tout ce qui sera ou pourra être dit, cette entreprise a un sens dont on mesurera sans doute mieux l'importance dans quelques années - si on veut bien laisser une chance à cet hymne jusque-là. Elle participe de la volonté d'identifier le maillot rouge et bleu et de susciter l'adhésion de ceux qui, par leur origine ou leur histoire, vibrent pour le PSG, à commencer par les joueurs eux-mêmes. Car le chant est par nature rassembleur et son caractère festif devrait assez facilement plaire à des supporters qui entonnent déjà l'air dans les gradins des stades. On ne demande pas aux Parisiens de chanter du Brel, mais de se fondre dans un projet collectif ; le pari est gagnant.

Ce projet à long terme exige quelquefois des sacrifices à court terme et les participants - salariés du club - sont alors tenus par leur contrat de se couvrir de ridicule l'espace de deux petites heures (soit à peine plus longtemps que sur un terrain de football, finalement...). Si certains ne rechignent pas à l'exercice et se prêtent même plutôt au jeu, on imagine sans mal Carlo Ancelotti plus à l'aise au bord d'un terrain que dans un studio d'enregistrement. Peut-être apprécierez-vous mieux la prestation des apprentis chanteurs en vous renvoyant à d'autres projets analogues, plus ou moins heureux (ma préférence va à la performance des anciennes gloires de Liverpool...), mais qui ont ceci en commun d'être entrepris par des grands clubs.



"Pazza Inter" (Inter Milan)


"Anfield Rap" (Liverpool)

jeudi 22 mars 2012

Sublime-inal Barça

A la lecture d'un article insolite, je me souviens assez imparfaitement du conseil prodigué par Machiavel aux gens de pouvoir : il y a deux façons de traiter les individus, disait-il, les corrompre ou les occire (Le Prince, 1532). Par corruption, entendez pollution de l'esprit, manipulation savante et confusion chèrement entretenue à coups de sols, d'agnels ou d'écus blancs, maintenant d'euros ou de dollars, sinon à force de rumeurs colportées et la plupart du temps inventées. Pour achever d'instiller le doute, le célèbre théoricien italien aurait sans doute préconisé de recourir à une arme implacable s'il l'avait connue (elle n'a été "théorisée" qu'à la fin du 18e siècle) : la théorie du complot, bien confortable pour réécrire l'Histoire ou se refaire une virginité.

La parenthèse est refermée, et j'invite les lecteurs d'OS à la découverte d'une perle, une annonce si caricaturale qu'on la qualifierait sans hésiter de canular grotesque. Ce que rapporte l'ancien journaliste du New York Times, fan de notre soccer et spécialiste de la région persique, semble pourtant bien réel : James M. Dorsey a révélé sur son blog l'incroyable entreprise de la chaîne de désinformation syrienne Al Dunya, qui tente de corrompre ceux que le gouvernement de Bashar al-Assad ne peut occire, faute d'être à la portée de tir de ses snipers.


Figurons-nous que le FC Barcelone ourdirait une odieuse conspiration contre le régime de Damas... Le club catalan mettrait en effet sa science du football au service des rebelles. Des messages codés à destination du front de libération ont été "interceptés" par des experts syriens qui ont découvert que la tactique ainsi que les déplacements des joueurs catalans correspondaient point pour point, trait pour trait, au tracé de la carte de la Syrie et aux voies à emprunter pour la fourniture d'armes aux rebelles...

Là où il y a du pouvoir, il n'y a jamais de coïncidence. Moi qui ai toujours eu un regard suspicieux à l'endroit de toutes les formes de pouvoir, en particulier le monopolistique, l'idée ne me paraît pas totalement aberrante : une telle domination sans partage du monde est après tout bien anormale ; ça cache bien quelque chose, non ?

mercredi 21 mars 2012

Messi, Cristiano et les autres

Que n'écrira-t-on pas sur la pépite catalane ? Lionel Messi pulvérise à 24 ans seulement tous les records et les références du monde du football, au point de forcer l'esprit à imaginer désormais l'impensable. Tous les regards étaient en effet braqués hier soir sur la Liga, où on attendait du plus grand joueur de tous les temps, surnommé fort bizarrement la "Pulga" - la puce -, qu'il franchisse la barre mythique des 232 buts inscrits sous le maillot du Barça. Il n'y a guère qu'en Normandie que l'on gardait un oeil sur le duel que livrait Quevilly, club de National en mal de points, face à un Olympique de Marseille en manque de confiance - à ce titre, le seul point positif de l'élimination des Marseillais est qu'elle perpétue la légende de David contre Goliath qui stimule chaque année les amoureux de la grande Coupe.

A dire vrai, enterrer le record de Cesar Fernandez Alvarez (232 buts en 351 matchs entre 1939 et 1955) était presque génétiquement inscrit dans le programme de la soirée. Messi pouvait-il ne pas marquer deux buts à une équipe de Grenade qui se bat pour ne pas descendre à l'étage inférieur ? Réponse : non. Alors on s'extasie devant le nouveau triplé du génial argentin, qui repousse désormais le record deux crans au-dessus de l'ancien (234 buts en 314 matchs). Qu'il semble lointain le premier but inscrit par Léo, face à Albacete...


La performance est certainement mieux mise en valeur lorsque l'on se livre à un exercice de comparaison qui offre du recul comme des ordres de grandeur : sachez ainsi que JPP, le monsieur but de l'OM, a inscrit 185 buts en 244 sorties sous le maillot ciel et blanc et en 6 saisons (le meilleur buteur du club olympien est le Suédois Gunnar Andersson qui appartient à la préhistoire, avec 192 buts au compteur entre 1950 te 1958). Que Pedro Miguel Pauleta est entré dans la légende du PSG en marquant 109 buts en 212 matchs (5 ans) et que Filippo Inzaghi, le poison milanais, totalise 125 buts en 298 rencontres (10 saisons).

Mais on oublie un peu vite que celui qui marche sur les talons de Messi, sans parvenir jamais à le dépasser, présente des statistiques qui n'ont rien à envier au Barcelonais : en deux saisons et demi, Cristiano Ronaldo a réalisé la prouesse d'inscrire, pour le grand rival madrilène, 128 buts... en 129 matchs !

Des records en trompe l'oeil ?

Ces deux-là sont des extraterrestres assurément. Toutefois, précisons deux éléments qui expliquent en partie ces records. D'abord, l'un comme l'autre n'ont jamais eu à souffrir de la moindre blessure grave - à l'instar de Zidane -, une circonstance qui compte à ce niveau puisqu'elle n'entame pas leur confiance et leur permet de faire encore enfler les statistiques. Ensuite, on peut raisonnablement émettre des soupçons sur le niveau moyen de la Liga, ce championnat espagnol écrasé par deux superpuissances et tout juste animé par deux ou trois autres équipes qui se partagent les miettes à tour de rôle. Le Barça et Messi sont déjà largement au-dessus du commun des clubs, ils n'ont pas besoin qu'on leur facilite la tâche.

mardi 20 mars 2012

Impressionnant Ribéry


Grands arbres au Jas de Bouffan (1885-1887)

Savez-vous quel est le point commun entre Franck Ribéry et cette toile de Cézanne ? A priori, aucun. Du moins, jusqu'à ce week-end, où un rapprochement insolite s'est opéré à la faveur d'un simple geste de l'international-malgré-moi.

Celui qui n'en est pas à sa première facétie a, en effet, fait parler de lui outre-Rhin en empochant le droit de tirer un coup franc direct après avoir battu son coéquipier Kroos, qui se portait aussi candidat, à... pierre-ciseau-papier. Un comportement moins irrespectueux qu'espiègle quand on connait le joueur, quoi qu'en pensent les responsables du Bayern.

 
L'image prêtera à sourire. En quoi cela nous renvoie à Cézanne ? J'y viens : saviez-vous qu'en 2005, un dirigeant d'une grande entreprise nippone a utilisé ce jeu mythique, d'origine chinoise, pour mettre en vente sa collection de tableaux impressionnistes ? Un remède enfantin à gros enjeu : il s'est agi de départager deux salles des ventes fameuses, l'élue savourant la perspective de percevoir une commission douillette sur la future vente de la pièce du peintre français, estimée à une quinzaine de millions d'euros. Pour la petite histoire, c'est finalement Christie's qui remporta ce combat des chefs, le ciseau découpant le papier de son rival Sotheby's.

lundi 19 mars 2012

FC Miséricorde, bordel !

Je vous le donne en mille : l'information du jour est à puiser dans le réservoir des informations tombées... la semaine dernière ! Point de date de péremption, toutefois, pour ce non-événement qu'il aurait été d'ailleurs de bon ton de sortir un vendredi - je vous le confesse.

Ne jurez pas, Marie-Thérèse, je vous en supplie !

La terre a tremblé à Rome après que le Vatican a décidé de retirer publiquement son haut patronage d'une compétition officielle, bien que d'arrière-cour, pour ne pas dire obscure. De quelle compétition s'agit-il ? De la Clericus Cup, créée en 2009 pour promouvoir "l'humain et le social" et "relancer la tradition du sport dans la communauté chrétienne" ; tout un programme... Quand on dit que le football est universel et qu'il est capable de porter de belles valeurs !

Oui mais voilà, la compétition a beau, pense-t-on, être taillée sur mesure pour des religieux férus d'élévation, le Conseil pontifical pour les laïcs n'entend plus lui être associé à l'avenir, ceci afin de préserver sa soutane de la souillure du diable : "bagarres, gestes violents et blasphèmes se multiplient sur les terrains où se déroulent les matches alors que, sur les gradins, séminaristes et bonnes soeurs, dévorés par le démon du foot, se traitent de tous les noms quand ils ne se crêpent pas le chignon", peut-on lire, en effet, sur le site du Point...


Reportage diffusé sur France Télévisions (Stade 2) - cocktail détonnant, effet garanti.

Ceci n'est pas un sketch

Mettons de côté Notre-Dame-des-Victoires, assez peu bienveillante envers ses fils français, pour nous livrer à un questionnement plus profond : est-ce l'homme qui est idiot de nature ou est-ce le sport qui rend bête dans tous les sens du terme - sauvage et imbécile ?

Vous voulez mon idée ? Elle ne vaut pas un clou, mais j'ai la faiblesse de croire que le temps comme les méditations ne font rien à l'affaire : quand on est con...

dimanche 18 mars 2012

9 dans du vieux

Hier soir, la 28e journée de la Ligue 1 s'est déroulée dans une ambiance... particulière. Il y avait en effet un peu de tension sur toutes les pelouses du championnat de France, sans doute parce que la fin de saison commence à pointer à l'horizon, que les ambitions des uns ne se cachent plus et que les calculs des autres deviennent de plus en plus compliqués. Auxerre s'enfonce, Nancy se sauve, Evian casse la baraque, Lorient est renversant et Paris s'extirpe in extremis du piège caennais.

Les défaites se suivent et ne se ressemblent pas

Le derby entre Sainté et Lyon, qui a commencé à décharger son électricité à proximité du Chaudron, a tourné à l'avantage des convalescents lyonnais ; une occasion ratée pour les Verts de grandir et d'envoyer leurs voisins vivre leur prochaine campagne européenne devant la Playstation.


Quant aux Marseillais, ils sont en chute libre et vont finir par boire la tasse dans l'eau du vieux port. Ils font démentir le théorème qu'ils ont écrit pour se l'appliquer à eux-mêmes les saisons passées : rien ne sert d'être devant à l'automne, l'hiver et le printemps décident de tout. Avec une 6e défaite consécutive (5 en championnat, 1 à San Siro mardi), le récent qualifié pour les quarts de finale de la Champions League remet brutalement les pieds sur terre après une parenthèse milanaise enchantée. La question se pose, naturellement : Didier Deschamps est-il menacé ? Il y a les coupes, heureusement, pour amener un rayon de soleil sur le bilan olympien ; mais, dans un club comme l'OM, le nom de l'entraîneur ne suffit pas toujours à le visser solidement sur le banc...

Montpellier voit rouge

Le fait majeur de cette journée est la mauvaise sortie comptable du dauphin de Paris, Montpellier, défait en Lorraine après avoir enregistré deux exclusions. A neuf pendant une demi-heure, évidemment... Deux biscottes rouges, c'est assez rare et, en l'occurrence, elles sont logiques, arithmétiquement inévitables. Un défenseur retient un attaquant filant au but et un tacle par derrière en position de dernier défenseur, il va falloir qu'on me sorte de sacrés arguments pour me convaincre du contraire. Et pourtant... La thèse n'est pas partagée par l'entraîneur montpelliérain, qui jette la pierre sur l'arbitre.

La colère froide de René Girard, on la connaît. L'homme ressort ses vieux habits, il n'en est pas à ses premières sorties verbales qu'on croit destinées à protéger - en public - son jeune groupe ; une sanction tombera encore des lèvres de la commission de discipline, voilà tout... Dommage que ce paternalisme prenne le pas sur le reste car reconnaître ses torts et ravaler sa déception sont aussi des valeurs à transmettre à ses ouailles.

Refermons cette parenthèse. Finalement, cette journée a créé plus de noeuds devant qu'elle n'a ouvert de perspectives. Les équipes se tiennent plus que jamais dans un mouchoir de poche, selon l'expression consacrée. Tout doit encore s'écrire, car rien ne s'est écrit hier.

samedi 17 mars 2012

Good run pour trois Frenchies

Je me suis lancé un nouveau défi que d'aucuns diront perdu d'avance et ils n'auront pas complètement tort : publier un billet quotidien sur l'actualité sportive sur le mode "un jour, une info sport". Une telle présence sur la toile requiert du temps et de la motivation, mais la difficulté sera aussi dans la sélection de l'actualité à traiter puisque choisir, c'est exclure et rien est simple lorsque l'agenda est particulièrement chargé.

L'événement du jour, du moins celui que j'ai choisi d'aborder, n'est pas la dernière rencontre du Tournoi des VI nations, disputée à Cardiff par notre Coq bleu pâle - un pied-de-nez à l'Histoire puisque les Gallois devraient mettre la main sur le trophée en réalisant un grand chelem au nez et à la barbe de leurs adversaires du jour... qui leur ont chipé leur ticket pour la finale du Mondial kiwi. Non, l'événement, il faut aller le chercher à la périphérie de Madrid. Un cocorico pour une grande première : trois Français en table finale d'un tournoi de l'European Poker Tour.

Chapeau, Nico Levi !

En fait, la performance avait déjà été réalisée en 2011, mais c'était alors sur nos terres, à Deauville avec, à la clé, la victoire de Lucien Cohen. Pas de happy end, cette fois, pour les trois Frenchies en course puisque le tournoi a été remporté par le - seul - Danois attablé, un certain Jensen (le Dupont local). La performance collective mérite toutefois d'être signalée pour l'extrême régularité des joueurs Français qualifiés pour cette table finale (8 derniers joueurs à rêver du titre). Or, la régularité est ce qu'il y a de plus difficile à tenir au haut niveau . Ainsi, Ilan Boujenah (6e), neveu de l'acteur, brille sur la scène européenne depuis deux ans. Bruno Lopes, alias Kool Shen (4e), vient tout juste de décrocher un chèque de 100 000 euros et une victoire dans un tournoi mineur - comprenez, français - et entend consacrer davantage de temps au poker pour décrocher un bracelet dans un tournoi WPT (World Poker Tour), WSOP (World Series of Poker) ou EPT. Quant à Nicolas Levi (7e), l'homme au chapeau, membre du Team pro de la franchise bruellienne, est à créditer de trois résultats majeurs en 2011.

Et puis, ne boudons pas notre plaisir de pouvoir rabattre le caquet à l'une des pires grandes gueules du poker mondial, Tony G ! L'Australien d'adoption, natif de Kaunas (Lituanie), multiplie les déclarations assassines à l'endroit du poker national qu'il méprise comme jamais. Jugez un peu : "je dirais qu'en termes de classement mondial, la France se situe au même niveau que la Russie pour le titre de fournisseur officiel des pires joueurs de poker". Le genre de mots qu'on lance à bonne distance de ceux que l'on craint en réalité. Car, de mémoire d'homme, on ne l'a jamais vu sortir Guillaume Darcourt, Antonin Teisseire ou Bertrand Grospellier ni remporter le moindre bracelet...  

vendredi 16 mars 2012

Roger prend Nadal au bond

Roger Federer est un très grand. Celui qui a, 5 ans durant, marché sur le toit du tennis mondial avant de céder sa place de numéro 1 comme ses titres à de jeunes loups aussi ambitieux que talentueux, a pris son monde à revers en battant en deux sets secs Rafael Nadal en demi-finale de l'un des plus gros tournois du circuit - Indian Wells.

Certes, la surface lui convenait plus que la terre battue, par exemple, et la température de l'air, plutôt fraîche en cette période de l'année dans le désert californien, ne favorisait pas d'emblée le prodige Espagnol. Mais, même dans ces conditions de jeu a priori positives, beaucoup n'aurait pas misé leur fond de poche sur celui sur qui on pose volontiers désormais le regard tendre et sympathique que l'on pose sur les champions sur le déclin. Il faut dire, en outre, que l'épouvantail Nadal le dominait assez nettement du bras gauche et des épaules (28 victoires pour 9 défaites) au point d'avoir, pensait-on, pris un ascendant psychologique définitif.


Deux légendes en finale

Il en faut cependant davantage pour complexer Roger Federer. Le match a été plié en deux temps trois mouvements, maîtrisé, surtout, comme au bon vieux temps, sans fausse note : 6-3, 6-4 avec, en guise de conclusion, la spéciale du maître : un ace. Les rencontres en deux sets gagnants sont sans doute une formule qui sied encore au Suisse, qui n'a pas ainsi à se lancer dans des parties marathon dont chacun sait, lui le premier, qu'il n'en sortira pas vainqueur.

Roger s'ouvre ainsi une voie royale vers un 73e titre puisqu'il rencontre John Isner en finale, invité surprise du tournoi après avoir dégoûté Djokovic - numéro 1 mondial - avec ses aces à répétition. En quelque sorte, Indian Wells va se clôturer en beauté, avec la rencontre de deux légendes : Roger, d'un côté, et le  géant Américain qui est entré dans l'Histoire du tennis, par la porte de service, en disputant contre un Français la plus longue partie de tennis - c'était sur le gazon mythique de Wimbledon en 2010. Je ne vois pas Roger perdre un tel match. L'expérience, à ce niveau, fait une grande différence et les encouragements du public patriote et acquis à la cause du challenger Isner ne suffiront pas.

Ne tuons pas, néanmoins, la peau de l'ours, comme dirait l'autre. Là n'est d'ailleurs pas le sens de notre billet. On a simplement le sourire car le roi n'est pas mort ce soir ; vive le roi !

jeudi 1 mars 2012

L'art et la Mannschaft

La victoire des Bleus, hier, à Brème, mérite bien un nouveau billet pour vous dire mon plaisir et, aussi, pour répondre à la plus fidèle, aimante et aimée lectrice d'OS.

Une éternité - et c'est long

J'ai eu le sourire et je n'ai pas dévié mon regard du poste de télé. Je suis resté concentré jusqu'au bout, hormis, je le confesse, lorsque je me suis demandé si la règle selon laquelle les joueurs devaient arborer, les uns une couleur foncée, les autres une couleur claire, afin de les rendre parfaitement distincts aux yeux des téléspectateurs qui suivaient leurs exploits sur des écrans en noir en blanc, avait réellement existé ; il n'y a pas de sotte question, si ?...

Il y a bien longtemps que je n'avais pas passé une aussi bonne soirée en regardant un match de l'équipe de France. Pourtant, le caractère amical de la rencontre, ajouté à la qualité de l'adversaire, ne présageait rien de bon. Mais on a le droit, et peut-être parfois, aussi, le devoir de se tromper.

Le bisou de Giroud au passeur, Debuchy, après le premier but 

Mon esprit chagrin pourrait toujours chercher dans les absences, nombreuses côté allemand, quelque raison de ne pas bomber le torse. Mais même tout le mal que je pense d'un Ribéry, Valbuena, Rami ou Abidal n'arriverait pas à faire pencher la balance du côté du ronchonnement. Ne boudons pas notre plaisir ; non, bravo messieurs : vous m'avez redonné envie, et même un peu d'espoir pour la suite - quel luxe ! Comme si la France avait attendu de renaître depuis 2006 et que cette rencontre marquait le début d'une nouvelle histoire.

A nous l'Europe !

Bon. Faudrait voir à ne pas trop s'enthousiasmer non plus, il ne s'agissait pas du match du siècle. Mais il y a une éternité, vraiment, que les ballons de contre n'avaient pas été joués à quatre joueurs disponibles, giclant vers l'avant pour proposer une solution à un porteur de ballon qui n'avait que l'embarras du choix. De la présence devant, de la vitesse et du pressing, sans doute pas en permanence puisque la première mi-temps aura été plus laborieuse. Mais une belle maîtrise collective, à défaut d'être parfaitement maîtrisée sur le plan technique à quelques exceptions près. A des milliers d'années-lumière des Bleus version Domenech.

Si la performance n'est pas individuelle, il faut isoler la prestation de Debuchy, Giroud - certains hurleront, mais il me fait penser à Guivarch, en plus fin et nettement plus efficace en mode international - et Lloris. Un bon point également pour Nasri, qui aura finalement mis la marche avant en seconde période, Valbuena incisif malgré son lot habituel de déchet et de théâtre, et Ménez, qui aura transpercé la défense contre une flopée de petits coups.

Mon petit doigt me dit que l'esprit - sain - de concurrence et la nécessité de marquer des points ont dopé les uns et les autres. Reste à savoir si les rentrées de Benzema et de Rémy, incontournables devant, ne vont pas perturber cet équilibre presque parfait trouvé hier soir.